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Face aux flots déchaînés d’un immense océan
Un vieux quai tout pourri combattait l’ouragan
Sa mort le recherchait non-loin dans les parages
Mais ce héros vaincu ne perdait pas courage
Vaincu, l’était-il bien, non, on se méprenait
Son histoire dira vraiment ce qu’il valait
On avait décidé d’ériger forteresse
Pour aider les pêcheurs à vaincre leur détresse
Alors que mon village était un petit clan
À l’époque où mon père avait au plus cinq ans
Oui, on devait agir pour maîtriser les ondes
Trop de pauvres pêcheurs étaient morts dans leur ronde
De poutres et de clous, d’un courage de fer
On s’arma jusqu’aux dents pour affronter la mer
En moins de quatorze ans de profitable ouvrage
On compléta ce port pour triompher des âges
Ah! Qu’il était fougueux ce nouvel élément
Pour garder les pêcheurs avec tout son gréement
Pendant plus de trente ans, il servit sans relâche
Pas un seul instant il ne faillit à sa tâche
Des bateaux amarrés en son intérieur
Regardaient la tempête et berçaient en douceur
Ce majestueux quai, en partant du rivage
Repoussait sans gémir les lames les plus larges
Son phare lumineux éclairait les pêcheurs
Qui revenaient du large au soir à la noirceur
Que de doux souvenirs, quelle belle jeunesse
Mais tout est terminé et c’est avec tristesse
Que l’on entreprendra au début du printemps
L’entière destruction d’un port si imposant
Hier, je suis allé voir les derniers vestiges
De ce qu’avait été un si digne prodige
Le phare tout rouillé, balancé par le vent
Donne à notre vieux quai un aspect alarmant
De longs goémons verts coincés entre les poutres
Dégagent des odeurs causant bien des déroutes
Hier en revenant j’ai rencontré Zénon
Le doyen du village, un homme mûr dit-on
J’ai lu dans son regard deux lignes de détresse
La destruction du quai lui causait sa tristesse
Regardant vers le large, il me dit tout-à-coup
« J’ai bien cru de mourir avant ce maudit loup »